mardi

Inter-minables




Pourtant, je n'y comprends plus rien, à ce mot qu'on a toutes sur les lèvres. En fait, ce serait plutôt entre les dents, comme un bout de salade pas fraiche, encore pleine de sauce. Dès que je vois une fille sourire, je fais un bon en arrière : l'amour est là, vert, fripé, alien d'une autre époque, lubrifié à souhait et exhibé aux yeux de tous. Et ça me coupe l'appétit.

Pourtant, je vous adore, vraiment. Mais pourquoi faut-il que ce soit si dur, de s'y retrouver, de s'y comprendre, de s'y sentir au frais et au calme? C'est pas de votre faute, bien sûr. Ni tout à fait de la nôtre. Mais ces soubresauts à contretemps sont épuisants, j'y comprends rien.

Il voudrait bien. Il ne veux plus. Il n'en sait rien, au final, et pendant ce temps là, mon petit cervelet de pigeonne gambade, va paître la laitue des sentiments : la sauce douceâtre m'a complètement tourné la tête, et au final, je reste sur ma faim. On finit toutes seules, un vieux bout d'amour dans la bouche, un peu de bave sur le menton, les yeux écarquillés.

J'ouvre grand, très grand les yeux, et je n'y vois pas plus clair. C'est simple, pourtant. Mais la vie nous ferait presque croire qu'on ne maîtrise pas nos appels frénétiques, nos e-mails enragés, nos baisers volés et nos coïts enivrés, qu'ils sont dictés comme par une force supérieur qui nous entraîne, malgré nous. Notre volonté est ravagée à grands coups de brosse à dents, mais le petit bout d'amour est tenace. 

Bref, tout ça pour quoi.
Pour dire que je fais n'importe quoi.

Que je dis des bêtises aux premières oreilles qui passent, que je ne sais pas m'énerver après les bonnes personnes. Que je me suis laissée ravager le cœur par un dément, et qu'aujourd'hui, je lui trouve tous les charmes du monde. Que je laisse ce qui devrait être la chose la plus pure, la plus magique, aux mains d'inconnus inquiétants. Que je crois aimer un fantôme, qui me hante : je me débats comme une folle pour le repousser, mais rien à faire. Que ni mon corps, ni mon cœur, ne sont capables de faire ce qui est bon pour eux. Que milles ombres m'entourent, se succèdent, ne se ressemblent pas, me font peur.

Que quand je crois que je l'aime, je ne sais même pas de qui je parle.

Bref, tout ça pour quoi. Pour dire que je fais n'importe quoi.

Et que la salade, c'est pas vraiment le meilleur plat du monde.

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