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Les 40 visages du Diable


La grande nouveauté de BuzBook ! Bien qu'à mon avis, ce ne soit une nouveauté que pour moi : je découvre ça, ébahie, ébaubie, en toute apoplexie, alors que je viens de passer mon après-midi devant Disney Channel. Autant dire que j'étais déjà dans l'ambiance quand j'ai lu le panneau "Nouveau".


Face aux nouvelles actions des réseaux sociaux, je ressens toujours un mélange d'enthousiaste et de consternation, un peu comme devant Disney Channel justement : prenez l'exemple de la banque ahurissante émoticônes en forme de panda, de cactus, de singe bleu et ceux de "mon premier compagnon" qui sont plutôt flippant. Ah, et les "happy got lucky", aussi : vous rêviez d'envoyer des rouleaux de PQ souriants à vos amis pendant vos discussions enflammées, c'est maintenant chose possible. Enfin, ceux qui ont des iPhone savent déjà de quoi je parle...
Bref, l'adjectif "nouveau" est assez mal choisi pour nous prévenir qu'on peut désormais, sur BuzBook, "dire ce qu'on ressent ou ce qu'on est en train de faire". C'est vrai que c'est une sacré nouveauté. Donc, nous avons un choix incroyable, on peut dire en direct ce qu'on regarde, ce qu'on lit, ce qu'on écoute ... c'est vrai que les notifications Spotify, les invitations à Candy Crush et le mini-fil d'actualité des "j'aime" de vos amis, on était un peu perdu, y'avait pas assez d'infos.

Pour ce qui est des émotions, on est servi, avec 40 nouveaux smileys magnifiques que je vous montre tout de suite :

N'est-ce pas merveilleux? On remarque déjà quelque chose de frappant, sur ces 40 visages, 26 sont complètement cheatés car ils sont identiques. Oui, comme en témoigne mon joli petit montage, sachez que si vous vous sentez "seul" ou "stupide", ça revient au même, et que la nuance entre "en pleine forme" et "fainéant" est inexistante. Au niveau du faciès, en tout cas...


Pourtant, il y en a des mignons, hein. J'avoue que j'ai vraiment hâte d'utiliser le "vieux", le "perdu", l'"aimé", l'"irrité" et le "en sécurité", mais pour le reste, on s’aperçoit que si les nuances linguistiques survivent à la culture BuzBook, les expressions visuelles sont en voie de disparition. La mort de la frimousse, le décès de la grimace, l'extinction de la tronche est proche. Et je voudrais qu'on m'explique la différence entre se sentir "bien" et "confortablement bien".

Nous avons ici toute la panoplie de la parfaite attention whore, tous les outils du BuzBooker en mal d'amour : pour tuer une espèce, donnez-lui les clefs de l'expression facile. Avant, on pouvait préserver un minimum de pudeur, avec des smileys "basiques", ou alors faire confiance au manque d'imagination des désespérés dont les statuts se résumaient à "ptain moment dur a passé là.....". Vous avez trouvez dix euros par terre? Chanceux. Vous avez merdé avec votre besta? Coupable. Vous avez zonné pendant votre jour de congé? Fainéant. Vous passez le permis? Déterminé. Vous venez de piquer une tête? Frais. Votre nouveau coup de cul de l'été? Amoureux. Ou Merveilleusement bien, puis très vite Incertain, Déprimé, Seul et Horriblement mal.

Même plus besoin de raconter l'histoire, de jouer les exhalés à la vie de rêve ou les oscillateurs de balcon, un simple visage dira au monde votre sensation précise, votre mal-être ou votre joie la plus intime. J'attends avec grande hâte les prochains smileys, du style "Indigestion du Nouvel An", "Orgasme matinal", "Vous aviez raison j'aurais pas du me remettre avec mon ex", "J'ai peur pour mon avenir professionnel" et "Je vais la demander en mariage ce soir". Et le pire, c'est que la fille qui écrit ce papelard hypocrite adore envoyer des autocollants de petits chats sur BuzBook, des petits chats pâtissiers, des petits chats qui font du vélo, des petits chats qui dorment dans des cartons de pizzas. Qui rêve secrètement d'être un jour "en couple" sur BuzBook pour de vrai, et qui est transportée de joie si sa photo de profil fait plus de 60 "j'aime".

Je rêve aussi secrètement du moment où BuzBook sera passé de mode. Déjà, pour voir ce qui va le remplacer, et qui sera surement has been pour mes enfants à venir. Ensuite, pour voir ce que ça va nous faire. Je fais malheureusement partie du morceau de ma génération qui ne peut pas se passer de BuzBook, parce que j'y parle, parce que j'y partage, ou plutôt, parce que je crois y partager. Au final, c'est un outil comme un autre, et je crois contrôler la situation : ma façon compulsive d'utiliser Budy Poke prouve peut-être le contraire. Ou alors est-ce le symbole d'un détachement réel et d'une profonde ironie? 

Je vous laisse sur cette super vidéo qui m'fait dire que l'important, au fond, c'est de savoir qu'on est ridicule ! 




AU FAIT ! 
J'ai bien pris note de vos participations géniales au concours du Trophé Troimilcébo, et je m'y atèle !

... si tu m'aimes, alors tu aimes ma page.
Ce n'est pas de l'auto-tunes, c'est de la mise en abîme.